En 1994, Audi lance, juste pour voir, un drôle de break doté d’un puissant 5 cylindres turbo de 315 ch revu et corrigé par Porsche, le tout associé à la transmission intégrale Quattro. Il s’agit de la singulière RS 2, capable d’emmener une petite famille à plus de 262 km/h, qui se pose comme le premier break vraiment sportif de l’Histoire.
Un genre bien particulier dont Audi s’est fait depuis une spécialité, en pérennisant ce concept à travers sa première RS 4 (type B5), commercialisée à partir de 1999.

Audi RS 4 (2017-2024) : un V6 2.9 biturbo de 450ch

Dès lors, chaque génération d’A4 a eu le droit à son dérivé « RS », et la toute dernière (type B9) ne déroge pas à la règle. Présentée en septembre 2017, celle-ci découle étroitement de l’A4 break, dite « Avant », mais adopte des voies et des ailes élargies abritant des jantes de 19 pouces, des boucliers modifiés, un châssis sport abaissé de 27 mm et deux grosses sorties d’échappement ovales.
Sous le capot, cette RS 4 opte pour un V6 2.9 biturbo de 450 ch commun à la Porsche Panamera, le tout étant attelé à une boîte Tiptronic à 8 rapports.
En comparaison avec les V8 installés sur les deux générations précédentes développant la même puissance, on perd en rondeur et en sonorité, ce qui incite à sélectionner un exemplaire doté de l’échappement sport optionnel reconnaissable à ses canules noires. Mais sachez que ce bloc très compact entièrement en alliage, plus léger de 30 kg que le V8, offre de meilleures performances tout en consommant moins. Et avec un couple de 600 Nm disponible de 1 900 à 5 000 tr/mn, l’agrément de conduite y gagne.
En 2019, l’A4 est restylée, ce qui vaut aussi pour la RS 4. Cela se restreint surtout à des phares affinés, toujours à LED, et à un intérieur pourvu d’un nouvel écran tactile, sans toucher à la mécanique. À la toute fin de carrière du modèle, en 2024, Audi propose une série limitée baptisée « Edition 25 Years » pour célébrer ses 25 ans. Ce collector livré exclusivement en « Jaune Imola », produit à 250 exemplaires, voit son V6 biturbo gagner 20 ch (470 ch), tandis que la bride est relevée à 300 km/h. Des prestations revues à la hausse, tout comme le prix, de près de… 50 000 € ! Si cette version ultra-rare navigue encore à des altitudes tarifaires déraisonnables, ce n’est heureusement pas le cas des RS 4 « normales », affichées désormais à moins de 50 000 € en Phase 1 lorsqu’elles approchent les 150 000 km.

La carrosserie et la structure

Cette RS 4 hérite de nombreux éléments spécifiques, comme des ailes élargies ou des boucliers en composite redessinés. Le rendu est juste parfait, avec des ajustages millimétrés et des peintures très bien appliquées offrant brillance et profondeur. Un aspect « brouillon » (peau d’orange, différence de nuances, ajustages perfectibles…) doit vous alerter : vous êtes en présence d’un exemplaire qui a été accidenté et mal réparé.
Sur ce modèle, à la garde au sol assez basse, les bas de caisse soulignés selon la configuration d’une lame en carbone ou de composants laqués en Black Piano sont très exposés, de même que le spoiler avant. Soyez vigilant car ces éléments exclusifs sont chers.

L’intérieur

L’instrumentation digitale est spécifique (avec compte-tours actif selon la température du moteur). La dotation, sportive et généreuse, inclut notamment des sièges baquets en cuir et des logos « RS 4 » (seuils de porte, volant à méplat). Les options sont chères et nombreuses, tout comme les packs (Black Piano, Carbone…), sans compter le service de personnalisation Audi Exclusive. Sans égaler le niveau de finition des générations précédentes, la qualité perçue est convaincante. À cause d’une mise au point perfectible de certains logiciels, les « Phase 2 » peuvent présenter des bugs au niveau de l’écran tactile, qui devient tout noir. Audi a procédé à une mise à jour, étendue jusqu’au combiné d’instruments, en mai 2021, mais aussi à un rappel pour le non-déclenchement de l’alarme vouée aux ceintures de sécurité arrière lorsqu’un passager est assis.

Le moteur

Pour ses modèles RS, Audi fait parfois cause commune avec Porsche, ce qui est ici le cas puisque ce V6 2.9 biturbo se trouve notamment sur la Panamera d’entrée de gamme. Disons-le tout de suite : ce moteur à distribution par chaîne brille par sa fiabilité.
Cela sous-entend bien sûr de respecter un temps de chauffe pour les turbos et a contrario de refroidissement après une forte sollicitation. En usage régulier, il faut procéder à une révision tous les 30 000 km dans la limite de 2 ans, avec vidange et remplacement des filtres, ce qui coûte 1 000 € environ dans le réseau. Une fréquence à diviser par deux en cas d’utilisation intensive répétée. Comme sur les diesels, ce bloc supporte mal les petits parcours, ce qui peut encrasser les soupapes, réclamant un nettoyage spécifique par micro-sablage. Par ailleurs, sachez que l’adoption obligatoire d’un FAP à partir de 2020 a quelque peu étouffé la sonorité de ce V6, déjà peu loquace à l’origine. Un déficit sonore qui a poussé de nombreux amateurs à sélectionner l’échappement sport optionnel.
À l’usage, les éléments en plastique intégrés aux clapets actifs peuvent se fendiller sous l’effet de la chaleur. Enfin, certains ont déploré une montée en régime du V6 pouvant être chaotique, signe d’une gestion électronique défectueuse exigeant une reprogrammation en atelier.

La transmission

Cette RS 4 bénéficie de la transmission intégrale Quattro, gage d’efficacité mais aussi d’une certaine agilité grâce au Torque Vectoring. Cette transmission utilise un Torsen mécanique, ce qui impose d’avoir 4 pneus identiques. Leur usure doit être régulière, et en braquant à fond, il ne doit pas y avoir de phénomène de « ripage ». Dans le cas contraire, méfiance, car remplacer le Torsen peut coûter dans les 4 000 € ! Assurez-vous qu’il n’y a pas de fuite au niveau du joint spi du pont arrière (1 000 €). S’il y a un sifflement à partir de 160 km/h, c’est que l’arbre de transmission n’est plus équilibré et qu’il faudra intervenir sur le palier central et les roulements. La boîte Tiptronic à 8 rapports ne pose aucun problème de fiabilité, mais Audi préconise une vidange à… 240 000 km.

Les trains roulants

Avec un poids minimal annoncé à 1 715 kg, ce break a tendance à user rapidement pneus et freins, plus ou moins vite selon votre style de conduite. Les disques acier coûtent très chers (environ 2 500 € sans la pose rien que pour le train avant), et un jeu de plaquettes table vers les 650 €. Des prix qui explosent à près de 15 000 € pour les exemplaires dotés des disques optionnels en carbone-céramique, mais à moins de les abîmer, ils sont censés être inusables. Certains déplorent un grincement audible au freinage : pas de panique, cela est dû à la température des plaquettes, celles-ci pouvant en effet couiner à froid… ou lorsqu’elles sont trop chaudes. De même, des claquements perceptibles du train avant sont souvent causés par la présence de cailloux coincés au niveau du berceau moteur. Plus gênantes sont les fuites possibles des amortisseurs pilotés DRC (Dynamic Ride Control), notamment arrière, dont la remise en état revient à 2 000 € environ.
Enfin, comme sur toutes les sportives de ce calibre, les jantes en alliage (19 à 20 pouces) s’exposent particulièrement aux coups de trottoir. Un élément d’abord esthétique facilement contrôlable.

Audi RS 4 (2017-2024) : les coûts d’entretien et d’assurance

L’entretien est onéreux, notamment en raison des coûts de main-d’œuvre élevés dans le réseau (plus de 200 €/h à Paris !). Si les indépendants sont naturellement au moins deux fois moins chers, y aller n’a pas d’intérêt tant que l’auto est encore sous garantie. Pour parcourir 10 000 km, comptez 2 500 € environ.

Les tarifs en occasion

Cette RS 4 produite à partir de 2017 étant encore jeune, les prix dépendent étroitement du kilométrage mais aussi des options retenues, avec un surcoût tout de même prononcé pour les « Phase 2 », naturellement plus récentes et moins bornées. Comptez 50 000 € environ pour une Phase 1 de 130 000 km, et plutôt 80 000 € pour une Phase 2 de 55 000 km. Le tout, ici, sans malus assassin de 70 000 € !

Le choix du spécialiste

« Cette génération de RS 4 est un modèle sans histoires, à la fiabilité avérée. Les seuls soucis rencontrés concernent plutôt les Phase 2, sujettes à des bugs électroniques, un problème résolu rapidement en atelier après une reprogrammation. Si vous passez par un particulier, il vous faudra rester attentif au bon état des consommables comme les pneus et les freins, ces éléments étant chers à remplacer. Enfin, un exemplaire suréquipé avec, par exemple, de beaux sièges à coque carbone ou une peinture issue du nuancier d’Audi Exclusive mérite un surcoût à l’achat. »

David-Alexandre Schwartz, spécialiste Audi S et RS (06.98.01.70.70)

Le verdict de Sport Auto

À moins d’être large côté budget, le choix le plus logique est d’opter pour une « Phase 1 », en tentant de dénicher un exemplaire le moins kilométré possible. Et quelques options qui apportent un vrai « plus », comme le pack RS ou une jolie teinte, feront notre bonheur !
Cette RS 4 n’est pas aussi expressive qu’une Mercedes-AMG C 63, mais elle séduit par son homogénéité, sa cohérence, son efficacité et sa polyvalence. Le tout en offrant ce qu’il faut de sportivité pour égayer chaque voyage à son bord.
Bref, cette ultime RS 4 reste une valeur sûre !